M. Jacques Nadeau fut prisonnier de guerre durant la deuxième guerre mondiale. Il nous livre ici un témoignage de son expérience du débarquement de Dieppe et de sa capture.
On était à East Lansing qui était le nom de la base. Le commandant qui était Dollard Ménard nous a tous rassemblé et c’est là qu’il nous a dit : « Les boys, tomorrow morning we’ll be in Dieppe! » On s’est mis à crier, on était content parce qu’on était écoeuré de faire seulement que des entraînements.
On a quitté le port de Shoreham pour en ligne et puis on est sorti du port, on a pris la direction nord-est puis on a éventuellement rejoint les autres unités. Il y en a qui arrivait de Newhaven d’autres c’était de Portsmouth et tout de suite le convoi s’est formé. On avait 13 groupes en tout et partout il y avait 252 embarcations. Les Canadiens, nous autres, on était quelques 4963 si je me souviens bien. Et puis il fallait que les embarcations se placent là où ils devraient être puis on est parti en direction est à travers la Manche.
C’était une journée superbe comme le 19 qu’on a eu cette année ici. Ça été une journée chaude. Il n’y avait presque pas de vent puis la mer était, paraît comme de l’huile ni plus ni moins; c’était doux. Et puis on avait reçu des ordres de ne pas parler et de ne pas fumer surtout et puis de se reposer autant que possible parce que le lendemain on était pour être occupé. Nous les Fusiliers Mont-Royal on devait débarquer les derniers parce qu’on devait protéger la retraite de toutes les autres unités qui après avoir fait leur travail dans les différents endroits où ils devraient se rendre reviendraient par Dieppe. On serait dans nos rangs pour se rembarquer. Et nous on aurait attendu les derniers de tout pour s’embarquer nous même. Mais ce n’est pas tout à fait ce qui est arrivé.
Moi j’étais le dernier à débarquer parce que les vélos étaient en arrière sur, il y avait un petit pont à peu près de 18 à 24 pouces de large et puis j’ai passé la nuit là-dessus à voguer, heureusement que la mer était réellement calme. Quand le bateau à touché au galet de la plage il a resté pris là-dessus. Puis les gars sont tous débarqués puis moi, ça prenait plus de temps pour le petit pont qui avait là pour m’en allait en avant pour sauter. En avant il y avait moins d’eau parce que là où j’étais en arrière j’aurais disparu certainement dans 20 pieds d’eau et puis avec ma taille j’aurais pas fait grand instant. Et puis le commandant de l’embarcation m’a poussé avec une mitrailleuse dans le dos et puis je me disais à moi-même si faut qu’il pèse sur la gâchette Jacques Nadeau va disparaître. Ça fait que j’ai lancé le vélo à la mer et puis j’ai sauté après. Je me suis penché pour voir où était le fameux vélo mais je ne le voyais pas nulle part et puis j’ai dit que le diable l’emporte j’en trouverai un à Dieppe.
Durant que j’étais là les Allemands tiraient; il y avait des balles qui frappaient dans l’eau, puis je les voyais passer. Il y en a une qui a touché à mon casque d’acier mais heureusement que l’épaisseur double qu’il avait a diminué la vitesse et j’ai sorti de l’eau et je suis parti pour me jeter par terre et puis éventuellement vers les 2 heures dans l’après-midi la reddition a été commandé et puis tout s’est étaient et on entendait plus rien à part que des cris des blessés et puis les Allemands sont descendus sur la plage. Il y en avait un grand qui je vois encore la façon dont il agissait – il passait près d’un corps par terre puis avec son pied il tournait celui qui était là puis s’il était mort passait au tri un autre. Et moi, je faisais le mort; j’avais mon bras droit, ah, ma main droite sous mon menton et puis quand il était arrivé à moi il m’a mis le pied dans l’aisselle droite et puis moi je suis très chatouilleux et donc j’ai eu une réaction il m’a dit, il dit : « Komme komme mein liebe », ça veut dire : viens viens, mon cher! Il dit : « pour toi la guerre est finie. » Ça fait que je me suis levé debout, j’ai détaché mon équipement et puis j’ai été rejoindre mes camarades qui étaient sous la falaise. Il y en avait plusieurs qui était blessé. Il y en a beaucoup qui avait soif. Ça fait que j’ai demandé à un des gardes allemands, j’ai dit, j’ai fait signe, je lui ai montré les bouteilles d’eau des morts qui étaient là. Il a fait signe que, oui et je suis aller chercher une couple de bouteilles d’eau pour aider ceux qui en avaient besoin. Puis on a monté, on a été, on nous a fait grimper la falaise dans un endroit qui s’appelait le cirque. Une fois rendu en haut on nous a mis en rang de 5, on nous a compté. Il y avait un Allemand qui partait de gauche puis l’autre de droite puis après ils nous avaient fait, les deux trois cents qu’on était, ils devaient se rapporter à un officier; fallait que les deux chiffres soient les mêmes. Mais quand l’allemand à passé près de moi il me touchait à l’épaule ou au bras en nous comptant j’ai dit « Cochon ». Il a raidi et puis il est arrêté directement là puis on s’est regardé pendant quelques instants qui ont paru comme des minutes et puis éventuellement il y a eu un cri qui est venu d’en avant puis il a été obligé de continuer mais si ses yeux avaient été des mitrailleuses je ne vous en parlerais pas aujourd’hui.
Le premier septembre après qu’on débarquait en Pologne dans un stalag [abréviation du stammlager, le mot allemand pour un camp de prisonniers de guerre] numéro VIII-B. Puis c’est là qu’on a été pendant pas mal longtemps. Et puis j’ai tenté trois évasions; les deux premières n’ont pas marché, la dernière ça été en janvier 1945. Les Russes sont passés par l’endroit où on était. On avait été changé de stalag : on était en Poméranie, en premier j’étais en Haute-Silésie en Pologne, mais là on était en Allemagne dans ce temps là, en Poméranie. Aujourd’hui c’est polonais à nouveau. Et puis on s’est caché, et puis quand les Russes sont arrivés on a sorti.
Moi je suis revenu en Angleterre le premier avril après avoir traversé la Pologne et puis l’Allemagne, ah, la Russie, jusqu’à sur la mer Noire. En haut de ça c’est là qu’un paquebot de la Canadian Pacific Steamship Line est venu nous chercher. Je suis arrivé en Angleterre par l’entremise de la Mer Noire, la Mer Égée et à Malte on a changé de bateau celui là a arrêté à Alger et puis d’Alger à Gibraltar et puis à Gibraltar on a attendu une couple de jours pour que le convoi se fasse parce que la guerre n’était pas encore finie, il y avait encore des sous marins et puis éventuellement je suis débarqué en Angleterre le 1er mai. De là éventuellement je suis revenu au Canada à bord du Britannia un paquebot qui avait été bâtit juste avant la guerre et puis je suis arrivé à Halifax le 23 mai et puis le lendemain j’arrivais à Montréal, la famille m’attendait là!
extrait tiré du Projet Mémoire